Simplification et d’amélioration de la qualité du droit

Catégories: Administration, Assemblée Nationale, Interventions en réunion de commission

Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Mercredi 19 janvier 2011

Séance de 10 heures

Compte rendu n° 33

Examen de la proposition de loi, modifiée par le Sénat, de simplification et d’amélioration de la qualité du droit (n° 3035) (Chapitres Ier à III) (M. Étienne Blanc, rapporteur) 

La séance est ouverte à 10 heures.

Présidence de M. Jean-Luc Warsmann, président.

La Commission examine, sur le rapport de M. Étienne Blanc, la proposition de loi, modifiée par le Sénat, de simplification et d’amélioration de la qualité du droit (n° 3035) (Chapitres Ier à III).

M. le président Jean-Luc Warsmann. Nous allons examiner aujourd’hui, en deuxième lecture, les chapitres  IER à III de ce texte. Nous poursuivrons la discussion mercredi prochain.

M. Étienne Blanc, rapporteur. Je rappelle que la proposition de loi initiale avait fait l’objet, pour la première fois, d’un examen par le Conseil d’État, en application du dernier alinéa de l’article 39 de la Constitution, introduit par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008. Le vice-président du Conseil d’État, compte tenu de l’ampleur du texte, avait saisi simultanément les cinq sections du Conseil. Au total, onze rapporteurs avaient été nommés.

En première lecture, notre Assemblée a amélioré le texte, qu’elle a adopté le 2 décembre 2009. Le Sénat, dont trois commissions – celles de la culture, de l’économie et des affaires sociales – se sont saisies pour avis, a adopté la proposition de loi le 14 décembre dernier. Cinquante-huit articles ont été votés conformes et 14 ont fait l’objet d’une suppression conforme. Le Sénat a également supprimé des mesures qui ont trouvé un autre vecteur législatif, comme la réforme de la TVA immobilière, adoptée dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2010 en des termes très proches de ceux que nous avions retenus. D’autres dispositions, comme la réforme de la préemption, feront l’objet d’un texte spécifique. Le Sénat a par ailleurs introduit 72 articles additionnels. Au total, nous sommes saisis en deuxième lecture de 217 articles, que notre commission va examiner en deux fois.

M. Jean-Michel Clément. Le Sénat a supprimé à juste titre des articles qui n’avaient pas leur place dans cette proposition de loi, comme nous l’avions dit lors du débat en première lecture – je pense notamment aux dispositions relatives à l’urbanisme, touchant à la loi « informatique et libertés » ou concernant la fonction publique. Il est clair qu’on a voulu faire passer dans un véhicule législatif intitulé « simplification du droit » des dispositions qui n’avaient rien à y faire – comme le prouve le fait qu’elles ont trouvé place dans des textes spécifiques adoptés par la suite.

Nous avons néanmoins à débattre de très nombreux articles, dont 72 sont nouveaux, qui relèvent de domaines très variés. Certains transposent en catimini des directives européennes, sans nous laisser le temps d’en mesurer l’impact. Certes il est nécessaire d’améliorer la qualité formelle de la loi, mais il faudrait vérifier dans le détail les conséquences des dispositions proposées ; si nous avions pu le faire pour un certain dispositif adopté voilà deux ou trois ans, nous nous serions évité des déconvenues.

S’agissant de réaliser une œuvre collective de simplification, cinq sections du Conseil d’État ont été mobilisées, trois commissions du Sénat se sont saisies pour avis ; mais je crains qu’au lieu de simplifier, on n’aboutisse au contraire à une complexification.

Deux principes devraient présider à notre travail : vérifier que nous légiférons à droit constant et, compte tenu du fait que les mesures proposées concernent des domaines très divers – relevant d’une cinquantaine de codes –, ne pas aller trop vite et recueillir les avis nécessaires. Je le répète, ce texte fourre-tout va plutôt complexifier le droit que le simplifier. Il faudra revoir notre méthode.

M. Philippe Vuilque. De fait, bien qu’utiles et nécessaires, les propositions de loi visant à la simplification et à l’amélioration du droit posent un vrai problème de méthode. Le nombre même d’articles qu’elles comportent laisse craindre une insécurité législative – dont nous avons eu récemment un exemple. À l’issue du travail du Sénat, cette proposition de loi est devenue un fourre-tout incompréhensible.

Je propose donc la création, au sein de la Commission des lois, d’un groupe de travail spécifique et permanent qui, au fur et à mesure de ses travaux, présenterait ses propositions sur tel ou tel point précis.

M. Michel Hunault. Quel meilleur objectif le législateur pourrait-il poursuivre que celui de simplifier et d’améliorer la qualité de la loi ? Le mieux est cependant l’ennemi du bien, et certains des amendements qui ont été déposés paraissent des cavaliers législatifs : des départements ministériels profitent de l’examen de ce texte pour essayer de faire adopter diverses dispositions.

De plus, il conviendrait de mieux distinguer ce qui relève de la loi et ce qui relève du règlement. Ainsi, les dispositions relatives aux compteurs d’eau ne me semblent guère relever des compétences de la Commission des lois de l’Assemblée nationale.

M. le rapporteur. Ce débat est récurrent. On nous objecte régulièrement que les textes de simplification et de clarification du droit sont des fourre-tout traitant de sujets disparates et confondent le domaine réglementaire et le domaine législatif, alors que nous voulons rendre plus lisible notre environnement juridique  – qui, avec 8 000 lois et 400 000 textes réglementaires, a atteint un degré de complexité inouï. Sans vouloir régler tous les problèmes, nous avons au moins la prétention de contribuer à la clarification.

Conformément aux nouvelles dispositions constitutionnelles, nous avons soumis la proposition de loi au Conseil d’État, dont l’avis a été publié. Rien ne s’est donc fait « en catimini », comme certains le disent : au contraire, nous avons agi dans la plus grande transparence.

Par ailleurs, je proposerai le rétablissement du dispositif relatif aux compteurs d’eau supprimé par le Sénat. De fait, la gestion des fuites d’eau pose de nombreux problèmes aux collectivités et aux élus locaux. Le dispositif proposé vise à reporter sur l’entreprise ou la collectivité en charge de la distribution de l’eau le soin d’alerter le consommateur en cas d’excès de consommation. Une fois la fuite réparée, le paiement dû est limité au double de la facture moyenne des dernières années. Cette mesure, qui pose une règle dans un domaine où il n’y en a pas, représente une véritable simplification du droit. Je pourrais argumenter de la même façon sur chacun des articles.

Enfin, ce texte transpose en droit français certaines directives européennes. De fait, même si elles n’y gagnent guère en lisibilité, les lois de simplification sont un excellent vecteur pour nous acquitter de cette obligation.