Moyens du Parlement pour le contrôle 
de l’action du Gouvernement

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Assemblée nationale


XIIIe législature


Session ordinaire de 2010-2011



Compte rendu 
intégral

Première séance du mardi 25 janvier 2011

Moyens du Parlement pour le contrôle 
de l’action du Gouvernement

Discussion, en troisième lecture,
 d’une proposition de loi modifiée par le Sénat 

M. Michel Hunault. Je suis sensible à vos encouragements, monsieur le rapporteur, avant même que je ne m’exprime. Je dois admettre que vous-même et M. le ministre avez été particulièrement convaincants.

Si, en défendant la motion de renvoi en commission, notre collègue Dosière a exprimé des interrogations légitimes sur le fonctionnement de notre Parlement et sur l’exercice de la mission de contrôle et d’évaluation, essentielle dans un État démocratique, je considère, contrairement à lui, que les progrès n’ont pas manqué ces dernières années.

Avec l’examen en troisième lecture de la proposition de loi tendant à renforcer les moyens du Parlement en matière de contrôle de l’action du Gouvernement et d’évaluation des politiques publiques, nous abordons un sujet susceptible, me semble-t-il, de nous rassembler.

Le 21 juillet 2008 – date historique – le Congrès a adopté une révision constitutionnelle.

Pas moins de trente-huit articles de notre Constitution ont été modifiés, voire intégralement réécrits.

Je rappellerai à mes collègues de l’opposition que, si cette réforme a été adoptée, c’est parce qu’une majorité d’entre eux a joint leur voix à celles de la majorité au gouvernement, puisque les deux tiers des suffrages étaient requis.

Désormais, mes chers collègues, la Constitution ne se borne plus à dire que « la loi est votée par le Parlement » ; elle précise, dans son article 24, que « le Parlement vote la loi ». Au-delà de la seule grammaire juridique, c’est la fonction de contrôle de l’action du Gouvernement et d’évaluation des politiques publiques du Parlement qui se trouve gravée dans le marbre constitutionnel.

Après que l’adoption, en 2001, de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances a ouvert la voie à une montée en puissance du Parlement dans ces fonctions de contrôle, en confiant notamment de nouvelles missions et de nouvelles prérogatives aux commissions des finances de chacune des assemblées parlementaires, cette consécration constitutionnelle a permis, il y a près de deux ans, de poser les bases d’un contrôle plus systématique et plus transversal des politiques publiques par les parlementaires.

Dans la droite ligne de cette révision constitutionnelle, la réforme de notre règlement – auquel vous avez fait allusion, monsieur le rapporteur – a été, il y a quelques mois, l’occasion de repenser l’ensemble des dispositifs, instances et moyens précédemment consacrés par notre assemblée au contrôle de l’action du Gouvernement pour aboutir à la création du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, comité pluraliste chargé de réaliser des travaux d’évaluation portant sur les politiques publiques qui dépassent le champ de compétence d’une seule commission permanente.

Je rappellerai que c’est à l’appui des travaux de ce comité que nous avons discuté et même adopté, lors du débat récent sur les projets de loi relatifs au Défenseur des droits, des amendements conjointement signés par des députés de la majorité et de l’opposition. C’est la preuve, s’il en était besoin, que ce comité fait un travail opportun.

Sur la base des recommandations de la mission d’information menée par notre excellent collègue Claude Goasguen et par Jean Mallot, cette proposition de loi visait ainsi, en premier lieu, à compléter, par une modification de l’ordonnance de 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, les attributions de ce comité en conférant aux rapporteurs de celui-ci les pouvoirs de contrôle sur pièces et sur place dont disposent déjà aujourd’hui les membres de la commission des finances en leur qualité de rapporteurs spéciaux sur des missions budgétaires.

Dans un second temps, cette proposition visait à fixer les modalités selon lesquelles la Cour des comptes apportera son assistance au Parlement dans l’évaluation des politiques publiques. Pour les députés du groupe Nouveau Centre, c’est à la fois un progrès et une exigence autour desquels nous devrions tous nous rassembler. Les présidents des assemblées pourront ainsi, de leur propre initiative ou sur proposition du président d’une commission permanente ou d’une instance parlementaire de contrôle et d’évaluation, demander à la Cour des comptes de procéder à l’évaluation d’une politique publique.

Cependant, je tiens à le souligner, les modifications apportées au texte, notamment le rôle de filtre des requêtes dévolu aux présidents des assemblées, permettront de prévenir un éventuel engorgement de la Cour des comptes et préserveront ainsi l’équilibre général de cette juridiction.

Après que les présidents des assemblées se sont vu ouvrir la possibilité de saisir le Conseil d’État sur des propositions législatives d’origine parlementaire, cette proposition de loi marquait donc une nouvelle étape dans l’accroissement des moyens accordés au Parlement pour exercer ses missions constitutionnelles. C’est pourquoi le groupe Nouveau Centre a apporté, en première comme en seconde lecture, son soutien à cette proposition de notre excellent président Accoyer.

À bien des égards cependant, on peut regretter que l’Assemblée nationale et le Sénat aient besoin de recourir à une troisième lecture pour définir un texte commun. Cependant, là où la première lecture avait été marquée par des divergences quelque peu surprenantes entre nos assemblées, la seconde lecture a été l’occasion d’un infléchissement de la position du Sénat. À ce titre et afin de permettre une entrée en vigueur rapide de ce texte, au terme d’une année de navette, le groupe Nouveau Centre soutiendra la position de notre commission et prônera comme elle l’adoption conforme de cette proposition de loi.

Je saisis l’occasion de votre présence au banc du Gouvernement, monsieur le ministre, pour dire que le Président de la République a fait le bon choix en vous nommant.

Quelles que soient nos sensibilités politiques, nous avons tous intérêt à défendre le Parlement, tant dans son rôle de vote de la loi que dans celui d’évaluation et de contrôle.

C’est à l’honneur de notre démocratie d’avoir un Parlement fort face à un exécutif qui l’est tout autant. La réforme constitutionnelle comme celle de notre règlement, avec les questionnements qu’elles ont posés ont permis – je parle sous le contrôle du président de la commission des lois – de renforcer le rôle du Parlement. Les ministres sont présents à l’occasion de l’examen des textes d’initiative du Gouvernement. Il est possible, sur les questions d’actualité et sur celles d’intérêt national, de réunir des missions d’information, et même des commissions d’enquête.

Le parlementaire qui veut travailler a l’occasion de le faire et dispose des moyens de faire progresser ces missions de contrôle et d’évaluation.

Le groupe SRC a demandé le renvoi du texte en commission au motif qu’il comportait encore des imperfections. C’est oublier les progrès réalisés ces dernières années, qu’une comparaison avec les Parlements d’autres démocraties du monde met encore plus en relief : questions au Gouvernement du mardi et du mercredi, questions orales sans débat, travail amélioré en commission, questions écrites.

Je tiens à le dire au rapporteur et au président de la commission des lois, qui sont des parlementaires expérimentés et vigilants : avec le texte qui nous est proposé aujourd’hui, nous avons le sentiment de faire progresser la cause du Parlement, de faire franchir une nouvelle étape à la démocratie parlementaire. C’est une exigence que nous devons avoir en commun. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)