L’ARDENTE NECESSITE D’UNE POLITIQUE INDUSTRIELLE

Catégories: Actualités, Editorial

Le contraste entre les images encore en mémoire du lancement de l’A 380 à Toulouse et l’annonce, deux ans après, d’un véritable plan de sauvetage de l’entreprise EADS, replace l’emploi au cœur du débat politique, à quelques semaines de l’élection présidentielle.

A EADS s’ajoutent Alcatel, les incertitudes sur la filière automobile, sans compter l’ensemble des sous-traitants. Au total, plus de 100 000 emplois industriels se trouvent aujourd’hui menacés.

Le lien entre l’incertitude de ces secteurs entiers de l’industrie n’est pourtant pas à rechercher dans la compétence et le savoir faire, puisque dans de nombreux domaines, l’industrie française est synonyme d’excellence : avions, TGV, automobiles, nouvelles technologies…

La cause des problèmes d’aujourd’hui est plutôt à rechercher dans le recul pris par l’industrie dont la part des emplois salariés n’a cessée, au fil des ans, de diminuer en comparaison au secteur tertiaire, en particulier au secteur des services.

L’heure est donc venue d’une véritable ambition industrielle comme l’une des conditions pour soutenir l’activité économique et la création d’emploi. Ces dernières années, le gouvernement a judicieusement favorisé l’émergence de pôles d’excellence, de pôles de compétitivité, l’idée centrale étant de concentrer les spécialisations, la recherche, l’innovation, la formation appliquée à des secteurs concourant à la spécialisation de secteurs industriels susceptibles de se positionner face à la concurrence mondiale.

Pour autant, l’efficacité de ces politiques est subordonnée à une volonté qui devrait être partagée par l’ensemble des forces vives du pays : sociales, éducatives, territoriales… animées d’une même ambition industrielle !

La concentration voulue par EADS des sous-traitants est synonyme de licenciements, de suppression d’entreprises, alors qu’une spécialisation par bassins d’emplois autour de pôles d’excellence basée sur le savoir faire aurait du être dès l’origine mise en oeuvre.

L’urgence aujourd’hui, puisque l’Etat dans le capital d’EADS a des obligations, est de recapitaliser l’entreprise, d’y associer les régions concernées, d’accompagner les conséquences financières du retard de l’A 380 et de donner surtout les moyens à l’entreprise de financer dans les meilleurs délais la construction d’un nouvel avion, l’A 350, sous forme d’avances remboursables sur les produits de la vente des futurs avions, en conformité avec les règles européennes.

Cette volonté d’intervention de l’Etat est la seule condition pour faire accepter un plan de sauvetage de l’entreprise. Au-delà, l’Etat a des obligations, non pas pour colmater, comme cela se fait depuis 25 ans, les conséquences humaines en finançant le coût de plans sociaux reposant essentiellement sur la mise en pré-retraite et la cessation d’activité des salariés les plus âgés, dans un pays où l’on regrette constamment le faible taux de l’emploi des seniors.

Plus ambitieuse serait une politique d’intégration des talents, et en particulier des jeunes qui bien souvent se heurtent, bien que diplômés, aux difficultés de l’accès au premier emploi au sein des entreprises. Une entrée progressive sous l’égide d’un tuteur expérimenté en fin de carrière professionnelle, serait bénéfique pour l’entreprise toute entière.

A l’heure où les contrats de projets sont en cours de finalisation entre l’Etat et les régions, il faut associer les politiques de recherche, de formation et d’innovation, aux ambitions industrielles de la France, autour de pôles industriels d’excellence.

Après Alcatel EADS, précédant de quelques mois PSA ( ?)…, la question sociale et de l’emploi interpelle l’ensemble de la classe politique. Alors que le Parlement est en congé, ce débat nécessite une vraie confrontation de projets politiques pour replacer l’industrie française au cœur des préoccupations, d’autant que d’autres problèmes s’annoncent : le vieillissement des chefs d’entreprises, la taille critique des Petites et Moyennes Entreprises dont il faudrait favoriser les concentrations, et encourager à leur profit l’appel à l’épargne et au financement privé, dans le cadre d’un capital risque et d’une fiscalité favorable à l’innovation.

L’avenir d’EADS appelle à l’action et à des réponses autrement plus concrètes que le discours lénifiant sur l’incapacité de l’Etat face aux mutations économiques et sociales !

Redonnons à la France une véritable ambition industrielle !

Michel Hunault, le 1er mars 2007
Député