Avenir de l’industrie ferroviaire

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Assemblée nationale


XIIIe législature


Session ordinaire de 2011-2012



Compte rendu
 intégral

Séance du mercredi 7 décembre 2011

Débat sur la situation 
de l’industrie ferroviaire

M. le président. La parole est à M. Michel Hunault.

M. Michel Hunault. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, je me réjouis à mon tour de l’initiative du groupe qui a demandé l’organisation de ce débat. La présence du ministre des transports montre que le Gouvernement partage l’intérêt de la représentation nationale pour cette question majeure : l’avenir de l’industrie ferroviaire en France.

Alain Bocquet avait également pris l’initiative de créer une commission d’enquête à ce sujet. Le rapporteur, Yanick Paternotte, et certains collègues ici présents – dont votre excellent suppléant, monsieur le ministre – ont témoigné leur attachement à l’industrie ferroviaire au cours des travaux de cette commission. Des visites de lieux de production ont été effectuées dans ce cadre, et je me souviens que vous étiez venu jusqu’à Châteaubriant, preuve de cette volonté partagée.

Plutôt que de volonté, il faudrait d’ailleurs parler d’exigence car l’avenir d’un pan entier de notre industrie est en jeu, avec ses dizaines de milliers d’emplois et le vrai savoir-faire d’entreprises très spécialisées et d’une multitude de sous-traitants.

Au-delà des travaux de la commission parlementaire et de nos débats, nous devons avoir une vision sur les moyens de conforter l’industrie ferroviaire.

Contrairement à l’orateur précédent, je crois que le Gouvernement a témoigné de ce souci de préserver l’industrie. En prenant la parole à cette tribune au nom de mes collègues du Nouveau Centre, je voudrais vous faire partager une réflexion autour des pôles d’excellence et de compétitivité que nous avons créés depuis une dizaine d’années, autour d’industries bien identifiées, en y associant la recherche et la formation.

M. Bocquet vient de suggérer que des formations soient dédiées aux métiers de l’industrie ferroviaire. Les régions, qui sont compétentes pour les schémas de formation et savent coller aux réalités du terrain et au savoir-faire industriel, ont un rôle à jouer en ce domaine.

Dans la compétition mondiale, nous devons affirmer notre volonté politique partagée de défendre les emplois et nous en donner les moyens. Les pôles d’excellence sont une piste qui a démontré son efficacité dans le domaine de l’aérospatial : ce secteur compte plus d’emplois dans la région nantaise qu’à Toulouse.

Venons-en au rôle de l’État. Comparaison n’est pas raison mais permettez-moi de vous rappeler ce que nous avons fait pour les Chantiers de l’Atlantique : à travers le Fonds stratégique d’investissement, une partie du capital a été contrôlée par l’État. Actuellement, les Chantiers ont un carnet de commande rempli parce qu’ils ont su se diversifier, mais si l’État n’était pas entré au capital, il y aurait 5 000 emplois de moins à Saint-Nazaire. Il ne faut donc pas nous renvoyer les responsabilités à la figure ; elles sont partagées.

Monsieur le ministre, nous avons aussi des propositions à vous faire. Alain Bocquet vous a parlé des formations. Pour ma part, j’estime que nous devrions travailler ensemble sur une piste : l’utilisation du Fonds stratégique d’investissement et de fonds dédiés à l’industrie ferroviaire.

Revenons à la régionalisation des TER. C’est le Gouvernement, sous la douzième législature, qui a confié aux régions la compétence des TER, ce qui a donné un formidable élan à la construction des trains régionaux.

Alors que mon prédécesseur à cette tribune a mis en cause le rôle de l’exécutif, je voudrais rappeler que c’est sous l’autorité du Président de la République que vous avez, monsieur le ministre, il y a un peu moins de deux mois, affirmé la volonté de maintenir les lignes interrégionales, dans une exigence d’aménagement du territoire, mais aussi pour ouvrir un nouvel horizon à des donneurs d’ordres dont le carnet de commandes offre peu de visibilité, comme nous le savons puisque la régionalisation est déjà bien avancée. Certaines pistes peuvent donc être explorées pour conforter l’industrie ferroviaire dédiée au transport de voyageurs.

Concernant le fret, il faut affirmer une volonté politique.

Vous ne serez pas surpris si je m’appuie sur ce que je connais le mieux : l’entreprise ABRFI de Châteaubriant. Dans le cadre d’un partenariat de recherche de fonds extérieurs et d’une ouverture du capital, il y a des marchés à conquérir en Europe. Il est un peu étonnant, monsieur le ministre, que la SNCF et ses filiales soient assez restrictives sur les commandes. Mais je dois saluer leurs efforts pour partager la maintenance, pour soutenir l’emploi dans certaines entreprises comme ABRFI.

Il faut identifier les besoins du fret. Nous devons décliner les conclusions du Grenelle de l’environnement : affirmer la nécessité d’une vraie politique du fret représentait une formidable avancée, considérant le nombre de poids lourds sur nos routes. Les besoins existent ; il n’y a aucune raison pour que cela ne marche pas.

La conjoncture difficile constitue un défi. Monsieur le ministre des transports, vous êtes au banc du Gouvernement, ce qui est le signe d’une volonté politique, et je vous en remercie encore. Ces questions sont tellement transversales qu’elles nécessiteraient presque la présence des ministres de l’industrie et de l’économie. Mais je sais que vous êtes très attaché à ces questions.

Au nom de mes collègues du Nouveau Centre, j’ai participé aux travaux de la commission d’enquête parlementaire et j’ai voté ses conclusions, lesquelles ne sont pas une fin en soi mais plutôt des pistes de réflexion. Ce débat est un peu une piqûre de rappel motivée par l’exigence d’agir, car il y a des emplois en jeu et des ouvriers qui suivent attentivement nos délibérations.

Opposition et majorité n’ont pas la même analyse concernant la réaction à la crise. Pour ma part, il me semble que nous nous sommes dotés d’outils indispensables, notamment de fonds dédiés qui permettent d’agir.

La Caisse des dépôts intervient dans certains domaines industriels à travers le FSI. Monsieur le ministre, si vous ne donnez pas vraiment les instructions pour le domaine de l’industrie ferroviaire, une plus grande lenteur sera peut-être fatale à certaines entreprises. La Caisse des dépôts est très sollicitée actuellement ; elle paraît très efficace dans le domaine de la finance. Il faut rappeler que l’industrie est un secteur essentiel. La part de l’emploi ouvrier a trop baissé en France pour que l’on ne maintienne pas ceux qui existent.

Quelles que soient nos différences au sein de cet hémicycle, nous partageons au moins une exigence, une volonté. À l’issue de ce débat – qui se veut plus, j’y insiste, une contribution à la réflexion que l’annonce de propositions toutes faites – nous devons trouver les moyens de prolonger le travail de la commission d’enquête et de nous mobiliser pour la défense de l’industrie ferroviaire, sous votre autorité, monsieur le ministre. Il ne s’agit pas de le faire à n’importe quel prix dans la compétition internationale, mais en utilisant des outils capables de faire émerger cette excellence, de maintenir et de développer l’emploi.